JEUDI SAINT

Publié le par Théophile Baye


"Vous devez vous laver les pieds les uns aux autres"

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean 13, 1-15

 

Nostalgie.

 

Vous avez sans doute, un jour ou l’autre, participé à un de ces « pots d’adieu »  qu’on organise lors du départ d’un collègue, d’un  chef ou d’un subordonné. Même si ce genre de manifestation prend souvent une allure décontractée, il y règne cependant, bien souvent, un peu de nostalgie. Et c’est bien normal. Chaque fois qu’on se quitte, il y a des liens qui se déchirent, et on en souffre. On a vécu ensemble tant de choses, tant d’événements heureux ou malheureux, il y a eu des tensions ou des raccordements, bref, tout ce qui fait la vie en commun. Alors, on évoque avec regret ce passé, avant de tourner la page.

 

Un geste étonnant

Ce soir-là, c’était Jésus qui avait organisé son « pot  d’adieu ». Si les trois évangiles synoptiques, Matthieu, Marc et Luc, le situent dans le cadre du repas de la pâque juive, Jean, lui, est plus imprécis. Il ne fait pas mention de l’agneau pascal qu’on mangeait au cours de ce repas de fête. Il ne parle même pas de l’institution de l’eucharistie. Par contre, il est seul à nous rapporter un geste étonnant de Jésus, avant de se mettre à table avec ses amis. Remarquez également qu’il ne nous est dit nulle part qu’il n’y avait là, pour ce dernier repas, que les douze apôtres, comme on les représente traditionnellement dans les tableaux des grands maîtres. Sans doute, des disciples, hommes et femmes, et Marie, la mère de Jésus, étaient là  pour ce dernier repas. Quoi qu’il en soit, ce qui se passe ce soir-là donne tout leur sens aux événements qui vont suivre, la nuit même et le lendemain.  Essentiellement deux gestes de Jésus : il lave les pieds de ses disciples, et il leur partage le pain et le vin comme étant son corps livré et son sang versé par amour. Deux manières de dire jusqu’où peut aller son amour pour les hommes : «il les aima jusqu’au bout. »

 

Donner sa vie

Jésus donne par avance ce que les hommes veulent lui prendre, sa vie. Ce faisant, il inverse le cours des choses : Tu veux prendre ? Eh bien je te précède, et je me donne ! Jésus assume d’avance les événements qui vont suivre. « Ma vie, nul ne la prend, mais c’est moi qui la donne. » C’est ce que signifient le pain et le vin  qu’il donne à manger et à boire en déclarant que c’est son corps et son sang : sa propre vie. Car la nourriture fondamentale de l’homme, ce qui le fait exister et le tient en vie, c’est Dieu lui-même. Nous puisons notre substance en Dieu et ainsi nous pouvons deviner que ce qui est la source de notre être, c’est l’amour.

Il est symptomatique de constater que Jésus a choisi le pain et le vin pour signifier son être propre, livré et destiné à nourrir l’humanité. Il avait d’ailleurs déclaré aux Juifs qu’il est « le vrai pain donné pour la vie des hommes ». On n’avait pas compris. Normal. C’est le « mystère de la foi ». Mais si on réfléchit, on sait bien que le pain et le vin, dans nos pays, sont nourriture courante, nourriture de tous les jours, dont le symbolisme est profond, puisqu’elle exprime à la fois le rapport de l’homme avec la nature et le rapport de chacun de nous avec tous les autres, « fruit du travail de l’homme et de la terre ». Don de la terre nourricière, mais aussi résultat de la technique et de l’effort entrepris pour domestiquer la nature.

 

Faites cela

Le geste du lavement de pieds a la même signification. Le maître qui se fait esclave (n’oublions pas que c’était le sale travail des esclaves de laver les pieds de ceux qui entraient dans la maison) nous invite à « faire cela », comme il l’a fait pour ses disciples. Il s’agit d’autre chose que de reproduire des rites : c’est dans la vie de tous les jours qu’il s’agit de se mettre au service des autres. Une religion dans le quotidien de la vie. Et ce faisant, Jésus nous dit qui est Dieu : celui qui se met au service des hommes, de leur vie, de leur vérité. Pour effacer la saleté ramassée sur la route humaine, la pollution inévitable de nos parcours. C’est en cela que nous avons à imiter Dieu lui-même : en aidant les hommes à retrouver leur intégrité.

Au fond, la meilleure manière de « faire mémoire » du Christ, c’est la charité. Une charité qui va « jusqu’au bout » de nous-mêmes. Telle est la tâche qui nous est assignée. Le monde a besoin de chacun de nous.

 

Père Théo. BAYE !

 

 

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